Le bail à Bruxelles: nouvelle ordonnance en matière locative

Une nouvelle ordonnance en matière locative
Un renforcement de la protection des locataires

Le 4 avril 2024, la Région de Bruxelles-Capitale a adopté une nouvelle ordonnance modifiant le Code bruxellois du Logement en vue de concrétiser le droit au logement (M.B., le 22 avril 2024).

Parmi les principales modifications instaurées, sont, notamment, à relever :

  • la suspension des effets du congé donné par le bailleur après le dépôt d’une plainte auprès de la Direction de l’Inspection régionale du Logement (ci-après dénommée la « DIRL ») (A) ;
  • la prise en charge par le bailleur des frais de relogement du preneur (B).
  • l’invalidation d’une clause contractuelle comprenant l’interdiction purement et simplement de détenir un animal de compagnie (C).

Les mesures respectives de ces modifications sont mieux reprises ci-dessous :

(A) Le congé notifié par le bailleur après le dépôt d’une plainte introduite par son locataire auprès de la DIRL est suspendu jusqu’à la prise de décision de l’Inspection du Logement (instance en premier degré) ou du Fonctionnaire délégué (instance de recours).

Ce congé ne produira ses effets, de manière rétroactive, que si les instances précitées confirment le caractère conforme du bien loué aux normes d’habitabilité des logements édictées en Région de Bruxelles-Capitale.

Autrement dit, le locataire excipera, durant la période d’instruction de sa plainte, soit du lendemain de son dépôt jusqu’à la décision administrative finale, d’une protection consistant en son maintien dans le bien loué nonobstant la notification du congé.

En revanche, le congé notifié antérieurement au dépôt d’une plainte ou après la décision des instances sus-décrites produit normalement ses effets.

(B) Le juge peut (il s’agit là d’une faculté) imposer au bailleur la prise en charge des frais de relogement.

Ces frais de relogement peuvent comprendre :

• les frais d’évacuation du logement ;
• les frais de transport du mobilier ;
• les frais d’installation dans le nouveau logement ;
• le différentiel entre l’ancien loyer et le nouveau loyer pour une période maximale de dix-huit mois.

Cette faculté peut être mise en œuvre lorsque le juge prononce soit la résolution du contrat de bail aux torts du bailleur soit la caducité du contrat de bail pour autant que le manquement qui a entraîné l’interdiction à la location, en cours de contrat, est imputable au bailleur soit la nullité du contrat de bail pour un motif d’insalubrité préexistant à la conclusion du contrat de bail.

(C) Toute stipulation contractuelle interdisant purement et simplement la détention d’un animal de compagnie dans le bien loué sera réputée non écrite.

Toutefois, la présence d’animaux de compagnie peut être conditionnée à :

  • l’absence de nuisance notamment de toute agressivité ;
  • la limitation du nombre d’animaux ou des espèces pouvant être détenues sur la base de motifs raisonnables.

La configuration du bien loué ne permettant pas une détention appropriée de certains animaux ou l’interdiction de détenir certaines espèces dangereuses peuvent rencontrer la notion de « motifs raisonnables ».

 

Ces nouvelles modifications participent immanquablement à un renforcement de la protection du preneur…au détriment de celle du bailleur.

La suspension des effets du congé adressé par un bailleur postérieurement au dépôt d’une plainte permet à son locataire de s’assurer de pouvoir rester dans le bien loué, à tout le moins, durant la phase d’instruction de ladite plainte.

Or, un temps certain peut s’écouler entre le dépôt de la plainte, la visite du bien loué par le Service d’inspection régionale du Service Public Région de Bruxelles, la remise de son rapport de conformité et la décision finale.

Durant ce temps, à la seule initiative de son locataire, le bailleur se voit priver de récupérer la libre jouissance de son bien alors qu’une motivation légitime l’a induit, fusse à titre conservatoire, à notifier un congé (échéance du contrat de bail, occupation personnelle, exécution de travaux importants…).

La débition des frais de relogement ne peut nécessairement s’apparenter qu’à une aggravation des sanctions civiles s’attachant à la dissolution du contrat de bail en raison d’une transgression aux normes minimales de qualité des logements bruxellois.

Ainsi, le bailleur peut être condamné à devoir dédommager son locataire d’un trouble de jouissance mais également de lui rembourser l’ensemble des frais liés à son relogement dont le différentiel entre l’ancien loyer et le nouveau loyer sur une période de 18 mois maximum.

L’interdiction de détenir un animal de compagnie est subordonnée à la démonstration d’un trouble anormal de voisinage ou l’évocation de motifs raisonnables.

A défaut, la détention d’un animal de compagnie est autorisée sans que le bailleur n’ait à donner son consentement préalable.

Au vu de ce qui précède, dans une logique vertueuse, il ne peut qu’être conseillé aux bailleurs, dès l’annonce de leur mise en location, de veiller à ce que leur bien immeuble satisfasse pleinement aux exigences minimales de sécurité, de salubrité et d’équipements des logements imposées en Région de Bruxelles-Capitale.