La confiscation des loyers provenant de logements en infraction – Arrêt du 29 novembre 2023 de la Cour de cassation

La confiscation des loyers provenant de logements en infraction – Arrêt du 29 novembre 2023 de la Cour de cassation

Dans une précédente contribution, nous avions parcouru l’évolution jurisprudentielle relative à la confiscation par équivalent des loyers provenant de logements aménagés en infraction urbanistique (cet article est disponible ici).

A cette occasion, nous avions pu saluer la jurisprudence de la Cour d’Appel suivant laquelle, pour déterminer l’avantage patrimonial pouvant faire l’objet d’une confiscation, il convenait d’apprécier l’impact de l’infraction urbanistique commise sur le revenu locatif pouvant être normalement tiré de l’immeuble en situation de droit.

En effet, suivant cette jurisprudence, ce n’était qu’en effectuant une comparaison entre la valeur locative licite d’un immeuble et le montant total des loyers générés grâce à l’infraction urbanistique commise que l’avantage patrimonial à confisquer pouvait être déterminé.

Par un arrêt du 22 novembre 2023, la Cour de cassation a mis fin à cette jurisprudence.

Cet arrêt est motivé comme suit :

« Le juge répressif décide souverainement en fait qu’un avantage patrimonial sur lequel porte la confiscation spéciale, a été tiré directement d’une infraction.
La Cour vérifie si, sur la base de son appréciation souveraine, le juge n’a pas méconnu la notion légale d’avantage patrimonial.
L’arrêt décide que la somme des loyers perçus sur les cinq logements illégaux ne constitue pas un avantage patrimonial tiré directement de l’infraction. L’arrêt s’en explique en considérant que le prévenu aurait réalisé un profit égal, voire supérieur, s’il avait loué sa maison en tant qu’habitation unifamiliale.
L’appréciation du lien de cause à effet entre l’infraction et le profit qu’elle génère doit s’effectuer de manière concrète et non sur la base d’une hypothèse étrangère au cas d’espèce.
Exclure de la confiscation l’avantage patrimonial délictueux au motif que le prévenu aurait pu réaliser le même gain autrement que par sa délinquance, revient à exiger qu’aucun autre fait, hormis le délit, ne soit apte à produire l’avantage.
Cette manière de juger est illégale : il suffit, en effet, pour que l’article 42, 3°, soit d’application, que le profit ait été obtenu grâce à la commission de l’infraction » (Cass. RG P.23.1062.F, 29 novembre 2023).

A lire la Cour de cassation, l’avantage patrimonial pouvant être confisqué correspond à l’ensemble des revenus locatifs produits par l’immeuble en infraction, même s’il est établi qu’en situation de droit ledit immeuble aurait également été de nature à produire des revenus locatifs similaires, voire supérieurs.

Cet arrêt rappelle que les Cours et Tribunaux ne jugent pas en équité, de sorte que, dans les faits,  la mise en location de logements irréguliers peut avoir de redoutables conséquences financières pouvant paraître comme étant injustes.